La légèreté « permet de se rendre dans le royaume où tout manque sera magiquement réparé ». (Italo Calvino)
Devenir vieux
Il y a un homme buvant souvent dans les cafés ou buvant souvent du café
Il rit mais il est triste et mal rasé et il ne lui reste plus que six ans de jeunesse
Cʼest un homme qui nʼa pas de maîtresse et alors il boit dans les cafés
Il fait pitié, il ne sait pas de quoi sera faite sa vie
Il est comme ces gens perdus, négligés mais ayant une certaine élégance (mais cʼest ça être élégant ?)
Voilà quʼil nʼy a plus que six mois de jeunesse
Et il se met à se parler, il parle à ses mains qui ne servent à rien, nulle part, et ne serviront jamais à rien
Le temps passe : il ne reste plus que six jours, puis plus que six heures Alors il sʼen va. On ne parle plus de lui.
Il ne reste que le verre où il avait lʼhabitude de boire
Voilà un texte qui nʼest pas mauvais, loin de là. Une belle mise en situation, de la complexité, des thèmes universels qui sont “parlants”, qui touchent, émeuvent, font réfléchir… (vieillesse, solitude, désespoir…)
Mais cʼest fort lourd : des redites, des adverbes, des phrases longues, des mots trop généraux (homme, servir, faire), des participes présents, des constructions lourdes. Jʼai mis en italique et en gras quelques unes de ces lourdeurs.
Que faire ?
Redites : laisser (une redite peut être importante), remplacer (synonyme, pronom) ou supprimer un des éléments
Phrases trop longues : scinder, remplacer par des groupes nominaux
Constructions lourdes : supprimer
Mots passe-partout, trop généraux : remplacer par un mot concret qui ajoute une dimension
Participes présents : remplacer par un verbe conjugué
Comment allez-vous réécrire ce texte bien lourd pour l’alléger ?
A noter :
Il est aussi possible, en poésie, dʼutiliser des notations sans verbes. Cela donne plus de force, et rend le poème plus suggestif (il ne faut pas tout dire, il faut surtout suggérer, donner à penser).
Et ne disons pas tout : la magie de la lecture par le cerveau comblera les manques.
“Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage :
Polissez-le sans cesse et le repolissez ;
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.”
(Nicolas Boileau, Art Poétique, 17ème siècle)
Afficher et télécharger le pdf de la note avec le poème « Vieillir » d’Odilon-Jean Périer
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